Symbole Kraakteken sur une lune en noir et blanc avec l'inscription Squat the moon

Squatter dans l'espace

Mixael S Laufer

Ce texte est une traduction de l’anglais d’un article de Mixael S Laufer Squatting in space publié sur The anarchist Library.

Tout le monde pense vouloir devenir un astronaute quand on sera plus grand. Quand les gens apprennent que les programmes spatiaux sont contrôlés par les gouvernements, que cela coute une quantité absurde d’argent, argent qui n’est pas utilisée pour nourrir ou enseigner au peuple. Et que ces programmes n’acceptent que les membres les plus privilégiés de la société : les gens retournent travailler pour survivre.

Le voyage spatial est nul. Tout est nul : c’est dangereux, ça coute très cher et c’est inaccessible a presque tout le monde tout en étant romantisée à tel point que tout le monde veut en faire.

Ce qui n’est pas dit par contre, c’est qu’il y a des machines et des structures abandonnées dans l’espace qui errent sans activité et qui attendent juste d’être rénovées et habitées de nouveau. On le dit pas parce que les programmes spatiaux n’ont pas envie d’avoir la réputation de jeter dans l’espace des machines a plusieurs millions de dollars pour qu’elles finissent réduites en cendres en les laissant entrer dans l’atmosphère a 30 000 m/s (7000 MPH).

Et comme une bonne blague du premier avril, le 2 avril dernier les restes calcinés de la station spatiale chinoise Tiangong-1 ce sont crashes dans l’océan Pacifique.

C’est comme acheter un Bugatti Veyron et, au lieu de changer l’huile de moteur a 1600 Km (1000 miles), la lancer par-dessus la rambarde. Le prix affiche d’une Veyron est de 1.7 million de dollars. En comparaison, le prix de Tangong-1 est plutôt de 3.1 milliards de dollars. Donc, vraiment, envoyer tout ça dans l’océan Pacifique c’est comme envoyer 1800 Veyron par-dessus la rambarde au lieu de changer l’huile. C’est le triple des Vaeyrons qui ont été produites jusqu’ici.

On estime que plus de 21 000 déchets spatiaux de plus de 10 centimètres et 500 000 petits morceaux entre 1 et 10 centimètres tournent autour de la Terre. Et c’est un gros problème, quand des trucs qui se baladent a 3 000 m/s (7000MPH) entrent en collision, un tas de mauvaises choses arrivent aux délicats instruments scientifiques. Même ceux qui sont renforcés pour évoluer dans l’espace.

La méthode traditionnelle est de les tracker et/ou de les de-orbiter, c’est-à-dire les crasher dans l’atmosphère pour qu’ils ne soient plus en circulation. Une meilleure méthode serait de les utiliser comme pièces détachées pour réparer des structures spatiales abandonnées pour qu’elles soient ensuite utilisées par de braves habitant·es de l’espace. Imaginez que l’on n’attende pas que les programmes spatiaux mettent leurs outils dans le domaine public pour que le monde puisse les utiliser; Mais que l’on saisisse tout ça avant que les orbites dérivent au point que tout prenne feu ? L’un des plus beaux principes du squat c’est bien que les infrastructures fonctionnelles ne doivent pas rester inoccupées si elles peuvent être utilisées par quelqu’un.

Et mème du point de vue légal, l’espaces est techniquement dans les eaux internationales, il est alors possible pour tout être humain de l’explorer. Seulement, tout comme les payantes d’antan ne pouvaient pas naviguer sur les océans, car ils ne pouvaient pas se payer ni de bateau ni d’équipage, les personnes désirant voyager dans l’espace aujourd’hui se retrouvent bloqué·es de facto parce qu’iels n’ont pas les moyens de se payer de véhicule spatial.

Et même si techniquement vous deviendriez pirate (l’espace est régi par les lois maritimes internationales) il n’y aura pas grand monde pour vous le reprocher. Les gouvernements dépensent tellement d’argent pour envoyer tout cela dans l’espace qu’ils ne peuvent pas se permettre d’aller vous chercher là-haut.

Faites leur un bras d’honneur a 41 000 Km (26 000 miles) d’altitude.

Plein de gens et d’entreprises travaillent déjà d’arrache pied pour transformer l’espace en un nouveau marche de l’extraction et de l’échange de ressources. Soyons les premiers à y aller et gardons le libre. En 2015 le Space Act a été signe aux US, violant le Traite sur l’espace de 1967, autorisant à s’approprier les terres et ressources extraterrestres. Cette loi était demandée par les lobbyistes du minage d’astéroïdes qui se sentent très bien de coloniser l’espace comme on colonisait la terre au bon vieux temps simplement parce que, cette fois-ci, il n’y a pas de population native à génocider.

Et pourtant, quelle surprise : la première loi états-unienne sur l’espace fut promulguée en 1958, quelque temps après le lancement de Sputnik-1. Elle s’assurait que l’espace serait bien un marché capitaliste et non un terrain de jeu communiste.

De plus en plus de stations spatiales seront lancées et probablement abandonnées. Nous devront être là pour les saisir le moment venu. L’espace sera le nouveau Jakarta.

A 50 Km d’altitude, dans la stratosphère, il y a un pic de température autours de 0°C. Des ballons de haute altitude peuvent atteindre 50 Km et plus en altitude et ainsi facilement atteindre cette zone. Et cela a déjà été fait deux fois récemment par les parachutistes Felix Baumgartner et Alan Eustace qui ont aussi enregistré leur chutes libre. S’ils s’étaient préparés un peu différemment, ils auraient pu rester là-haut au lieu de redescendre sur terre.

Des personnes assez motivées pourraient utiliser des ballons de haute altitude pour atteindre la mésosphère, utiliser des propulseurs ou un système de crochet orbital pour se catapulter en crashant leur ballon pour se propulser dans la thermosphère et rejoindre une station spatiale abandonnée. Ces personnes pourraient alors y attacher des modules fait maison comme des unités d’aquaculture ou développer de nouveaux modèles de permaculture sur place a force d’essai et d’erreurs.

Les nouveaux bidonvilles seront des cites-radeaux en orbite. De nouveaux groupes pourraient émerger, transcendé les races et les classes et devenir les space-squatteurs de structures spatiales abandonnées et recyclées. Les Uru-nuevos, les Xin-Tankas ou encore les Makoko-akotun.

L’exploration spatiale est une vraie opportunité d’explorer de nouveaux modèles sociaux et économiques. On doit tout construire de zéro parce qu’il n’y a de toute façon rien là-haut. Est-ce que cela tiendra ? C’est une question de volonté, de technologie et de chance. Essayons pour voir.

Les technologies spatiales vont progresser et les déchets seront filtreront forcément par Shenzhen comme toutes les technologies. On aura alors accès aux dernières technologies, qui fonctionnent tout aussi bien.

Contrairement aux programmes spatiaux gouvernementaux ou commerciaux qui doivent rendre compte a de grands patrons; les découvertes qui en résulteraient ne seraient alors d’une nature encore jamais vue. On en apprendra plus sur la psychologie de personnes indépendantes dévouées à passer un temps indéterminé confine dans l’espace avec un petit groupe de personnes. On en apprendra aussi dans le domaine de l’astrobiologie en étudiant les microbiotes dans des stations spatiales en développement.

On en apprendra plus sur la nutrition de personnes consommant de la nourriture produite en circuit ferme. De nouvelles expériences de physiques des particules pourrait être développée a l’aide du vide de l’espace bien moins cher et difficile à développer que les installations en très basse pression terrestres. On sera impressionné par les nouvelles formes d’art qui émergeront. Mais le plus important sera que l’on fera toutes ces découvertes avec une nouvelle manière de penser et dans de tout nouveaux champs de recherche. Beaucoup diront que c’est inutile ou irréfléchis mais tellement de choses pourrait en ressortir. Et les personnes vraiment libres appelleront ça un testament a l’esprit humain.

Peut-être que les premières personnes à marcher sur Mars, Encelade, Europe ou sur un caillou du nuage d’Oort ne seront pas des agents de l’État ni des millionnaires mégalomanes mais des personnes qui ont juste eu envie d’y aller. Ces personnes développeront des organismes génétiquement modifiés adaptés à vivre dans ces endroits autrefois considérés trop hostiles pour abriter la vie. Nous verrons des écosystèmes astrobiologistes synthétiques se développer à la fois artificiellement et naturellement.

Des solutions créatives aux problématiques spécifiques de ces environnements émergents, aidées par l’absence d’investisseurs ou de politiciens hors sol. Des solutions aux voyages et à l’exploration spatiale. Est-ce que certaines échoueront ? Absolument, mais on apprendra de cela aussi !

Burt Munroe a établis des records imbattables simplement parce qu’il n’avait pas de matériel de sécurité. Tout cela pour dire que des personnes assez courageuses peuvent aller dans l’espace si elles le veulent vraiment.

N’oublions pas le diagramme de la Science : Diagramme de la Science : Faire exploser des trucs -> Analyse des resultats : Si oui -> Science; Si non -> Divertissement; Si on fait semblant -> Mythbusters

Réquisition à distance

Bon OK, le nombre d’infrastructure inhabitables abandonnées en orbite est encore assez faible. Mais le nombre de machines fonctionnelles encore en orbite est assez élevé.

Il y a 98 satellites en piteux état actuellement en orbite autours de la Terre. La plupart d’entre eux ont encore un générateur nucléaire a radio-isotopes pouvant les alimenter en énergie. Leurs propriétaires n’en ont juste plus rien à faire d’eux et ont décide de jeter quelques millions de dollars du contribuable pour quelque chose de nouveau. Si vous arrivez à les pirater, vous pourriez les remettre en état de fonctionnement et faire plus de science. C’est toute l’essence du hacking : Faire plus avec moins.

Les satellites sont souvent abandonnés. On appelle ça la Passivisation en terme technique. N’est-ce pas intolérable ? À tous les niveaux ?!

Toute la beauté du piratage est que l’on peut occuper des espaces ou des objets sans être physiquement la. Utilisons les satellites inutilisés pour, mettons, proposer un service de télécommunication gratuit. Ou bien pour mettre a disposition la radio a toutes et tous. Pas seulement l’écouter mais aussi diffuser. On pourrait aussi détourner les satellites fonctionnels pour proposer un internet gratuit et libre pour toutes et tous. Outernet (Avant que cela soit renomme Othernet) était une entreprise qui voulait donner un accès gratuit et open-source dans les zones rurales. Vous pouviez construire votre propre récepteur avec une Raspberry Pi et une antenne parabolique, et ainsi pouvoir télécharger des morceaux sélectionnés de l’internet tous les jours. Et maintenant ce n’est qu’un des nombreux rouages du système industriel associatif qui cherche a ce que vous achetiez leurs logiciels propriétaires, leurs services par abonnement tout en se disant altruistes et ouverts. Faisons mieux.

Les possibilités sont infinies: Des enclaves de données renvoyant de grosses quantités d’informations sur terre, un système de monitoring des drones depuis l’espace, un système de surveillance open-source des prisons secrètes et autres black sites d’état, des radios pirates venant de l’espace, peut être même un nouvel internet.

Actuellement, les satellites Iridium sont sur le point d’être désaffectés. Ils vont être remplacés par de nouveaux, mais les anciens fonctionnent encore très bien. Certains d’entre eux, appelés hot-spares, n’ont même jamais été utilisés ! Ce sont des satellites en orbite basse non-geostationnaires qui permettaient la communication satellite. Ce qui est encore plus cool c’est que c’était un réseau mesh. Vous pouvez communiquer avec le satellite le plus proche et la communication va rebondir de voisin en voisin jusqu’à arriver à destination. Imaginez qu’a la place de laisser ces engins spatiaux a plusieurs millions de dollars tomber dans l’atmosphère et bruler ou se crasher dans l’océan; imaginez qu’un groupe de hackers particulièrement investis utilisent les informations de Stefan Sec Zehl et de Schneider, que ce groupe arrive à entrer dans le système par le reverse-engineering pour le hacker et le garder en l’air. Et ainsi construire un réseau satellite libre et ouvert que tout le monde pourrait utiliser avec un matériel simple et accessible, comme le R0cket ou les rad10 badges.

Bien sur, cela nous amène à la vision romantique de la liberté des ondes qui a existe pendant un certain temps : toute personne qui reçoit le signal peut écouter et toute personne qui envoie un signal peut être entendue. C’était la liberté ressentie par les radioamateurs des années 20, 30 et 40 (ou le mouvement des radios libres en France. Note de la traduction) avant que la FCC décide que les ondes électromagnétiques étaient la propriété du gouvernement. C’était proche de la liberté que l’on avait au début d’internet et aujourd’hui sur le darknet. Le principal problème du darknet actuellement est qu’il repose sur les mêmes infrastructures qu’internet et que, même si le trafic peut être dissimulé, cela devient de plus en plus difficile de garder les canaux de communication ouverts.

Je rêve d’habiles hackers capable de trouver des espaces d’émission sur le spectre électromagnétique. Des hackers qui trouveraient le moyen de créer des liens de téléchargement et de téléversement avec de vielles antennes paraboliques ou des parapluies recouvert de papier aluminium. Nous pourrions arrêter de se battre pour la neutralité du net et juste construire le nôtre.

Prenez les données et courez

Disons que vous n’avez pas les tripes pour vous lancer dans le voyage spatial et que vous ne savez pas trop comment pirater un satellite hors d’usage pour le remettre en marche. Il y a d’autres choses à faire.

Les objets en orbite émettent toujours des informations et vous pouvez les écouter. Même les satellites hors d’usage comme le NOAA-9 mis en service en 1984. C’est un peu comme écouter les murmures d’un ivrogne. Tout ce dont vous avez besoin c’est d’une antenne Yagi que vous pouvez fabriquer avec des cintres et du câble coaxial, ou encore du grillage et un tube de réfrigérateur. Vérifiez les horaires de passage du satellite et écoutez sur 136.770. En branchant quelques machines VHS au système, vous pouvez même émettre. C’est illégal sans licence, mais nous n’allons pas laisser la loi se mettre en travers d’une bonne communication extraplanetaire.

Il y a tant de choses à saisir tout là-haut. Une fois que vous commencez à écouter, il est difficile de s’arrêter. Et c’est pourquoi les radioamateurs sont si profondément enthousiastes. Dans le film Heat de 1995, le personnage Kelso pitch son travail a Neil dans l’échange suivant :

KELSO: Comme je le disait, c'est un peu plus qu'une estimation, ce sont les valeurs exactes. J'ai une impression ici des mouvements de fond des derniers mois.

NEIL: Comment avez vous eu ces informations ?

KELSO: C'est juste venu a moi. Tout cela flotte dans les air. Ils envoient toutes ces informations, je veux dire qu'ils projettent tout ca partout; tout ce que vous avez besoin, c'est de savoir ecouter. Vous voyez, je sait ecouter.

C'est simple, il vous suffit d'une antenne, d'un filtre pour selectionner ce dont vous avez besoin et d'un ordinateur pour interpreter le flux de donnees. Une simple boite avec linux dessus et une carte DVB-S suffiront. Vous pouvez ajouter quelques quelques outils pour ajuster ce que vous voulez recevoir, et envoyer le tout dans des decodeurs audio, video, etc.

Les emissions des satellites sont tres souvent en clair avec une quantite impressionnante de donnees, donnees que vous pouvez juste collecter. Vous payez pour recevoir la television par satellite ? Pas besoin. Vous pouvez recevoir le flux du satellite Horizon-1 de la NASA a 127°W. Vous pouvez recevoir DoD news du satellite AMC-1 a 103°W et Al Jazeera en anglais sur le satellite Galaxy-19 a 97°W. Et la liste est longue.

Les humbles heriterons des etoiles

Avec la surface terrestre actuellement gouvernees par un gouvernement ou l'autre, l'espace est logiquement la prochaine optionen terme de zone autonome. Comme tout ce qui est assez different du status-quo pour envisager de nouveaux paradigmes, l'acces a l'espace est garde loin des personnes qui n'ont pas le pouvoir. Cependant, tout comme dans le passe, les vrai personnes trouveront le moyen de s'emanciper du systeme au profit du peuple et pas des dirigeants.

N'attendez pas des gatekeepers de vous laisser jouer dans l'espace. Allez y.